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Printemps 2013
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LIÈGE
U
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et perches dans des réservoirs surmon-
tés par des lits de culture de laitues. Elle
utilise environ 10% de la consommation
d’eau nécessaire habituellement », ex-
plique le Pr Jijakli. Par ailleurs, associé
aux projets “Gastronomia” de la ville de
Seraing et “Ceinture aliment-terre lié-
geoise” porté par un groupe de maraî-
chers et acteurs associatifs, Verdir don-
nera à notre région l’une des principales
clefs de son indépendance alimentaire.
Si le succès est au rendez-vous, nul
doute que le modèle se généralisera
à d’autres villes wallonnes – on pense
déjà à Charleroi – et sera exporté en
Europe. En sachant qu’à l’horizon 2050,
75% des habitants de la Terre seront
des citadins, le concept risque vrai-
ment de s’internationaliser. Par ailleurs,
dans le contexte du réchauffement
climatique, la capacité de produire “à
l’intérieur” n’est pas à négliger dès lors
que l’on mesure combien le contrôle
de l’alimentation est un enjeu crucial.
Patricia Janssens
Voir la vidéo Ulgtv sur le site
www.ulg.ac.be/webtv/jijakli
Pour le projet “Verdir”, voir le site
www.ulg.ac.be/Verdir
D
’après la Société publique d’aide
à la qualité de l’environnement
(Spaque), 5000 friches indus-
trielles occupent environ 10 000 ha et
80% d’entre elles se situent sur l’axe
Sambre-Meuse, en milieu urbain et
périurbain. Or les friches industrielles,
d’une manière générale, entraînent une
dégradation de l’environnement. Il est
dès lors urgent de les réhabiliter, tant
pour l’aménagement du territoire que
pour le lancement d’activités écono-
miques prometteuses. A titre d’exemple,
la ville de Sheffield en Angleterre a
opéré dans les années 90 une recon-
version spectaculaire en réhabilitant
plus de 300 ha de friches industrielles.
Depuis quelques années maintenant,
l’idée de consacrer des terrains à une
agriculture urbaine fait son chemin,
revenant ainsi à un schéma médiéval
où les produits frais se cultivaient aux
abords des villes eu égard à la faiblesse
des modes de transport de l’époque.
Atouts liégeois
Aux Etats-Unis, à Pittsburgh ou à De-
troit, la mise en place d’une agriculture
nourricière sur les friches industrielles
fait partie depuis quelques années des
programmes municipaux. La ville de
Singapour est très clairement acquise
à la cause : elle produit 25% de ses
besoins en légumes et est autosuffi-
sante en viande. Ce que l’on appelle
aujourd’hui l’agriculture urbaine et
périurbaine est donc, dans les faits,
une réalité universellement répandue.
Forte d’une agglomération de 600 000
habitants, Liège bénéficie d’une taille
suffisante pour justifier une agriculture
in situ. « L’originalité du bassin liégeois
est de disposer à la fois d’une ville,
de friches industrielles et d’un fleuve,
observe Eric Haubruge, vice-recteur
de Gembloux Agro-Bio Tech. C’est une
conjonction très intéressante pour un
projet d’agriculture : nous disposons à
la fois de terrains et de locaux dispo-
nibles en ville, le tout en bord de Meuse,
moyen de transport doux par excellence,
c’est-à-dire très peu polluant. » C’est
à partir de cette constatation qu’est
né le projet “Verdir” (Valorisation de
l’environnement par la réhabilitation
durable et l’innovation responsable).
« Cette activité est bien sûr, en premier
lieu, une activité économique », déve-
loppe le Pr Haissam Jijakli, spécialiste
de l’agriculture urbaine. Et de prendre
l’exemple de la ferme “Uit je eigen stad”
à Rotterdam qui, depuis mai 2012, a
investi un ancien entrepôt industriel
afin d’y cultiver des champignons et
divers légumes. A côté d’un poulailler,
un restaurant et un magasin complètent
une offre de produits locaux destinés
à une clientèle autochtone ; 16 per-
sonnes travaillent dans cette ferme de
1,8 ha. L’activité est aussi écologique :
de l’aménagement des bâtiments à
l’activité elle-même en passant par le
transport des marchandises, la gestion
du site et le recyclage des déchets,
tout est mis en œuvre pour économiser
l’énergie et rejeter le moins possible
de CO
2
. Last but not least, l’agriculture
en ville a aussi une fonction récréa-
tive. Non seulement elle rapproche les
citadins de la nature, mais elle participe
en outre à un environnement apaisant.
Cultures à haute valeur ajoutée
A l’heure actuelle, il existe un projet-pi-
lote sur le site Magnetto, à proximité de la
Meuse, lequel serait basé sur l’hydropo-
nie – culture “hors sol” – fréquemment
utilisée déjà pour les tomates, les laitues
et les poivrons. Les plantes sont placées
dans des gouttières de façon à ce que les
racines soient alimentées par une solu-
tion nutritive adaptée à leurs besoins.
« Le système d’aquaponie associe la
technique de l’hydroponie avec un
élevage de poissons. La ferme Sweet
Water Organics à Milwaukee dans le
Wisconsin aux Etats-Unis qui s’est ins-
tallée, dans une entreprise désaffectée,
élève de cette manière 80 000 tilapias
>
L’ I NST I TUT I ON
L’agriculture urbaine
Des enjeux économiques, écologiques et sociologiques au cœur du projet Verdir