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LIÈGE
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Hiver 2011 - 2012
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Le PORTRA I T D ’ UN ALUMN I
Anne Boucquiau
Une pionnière ? « C’est un peu exagéré, mais nous étions effec-
tivement peu nombreux à l’époque et pas encore organisés en
association. Et il y avait peu de possibilités de formation, hormis
en France, pays de la gastronomie. » La possibilité d’obtenir un
diplôme complémentaire en nutrition demeure toujours limitée,
à l’heure actuelle. De surcroît, pour recevoir leur accréditation
et permettre un remboursement aux patients, les médecins
nutritionnistes sont tenus de suivre une formation continue
alors qu’aucune flière n’existe en Belgique. C’est donc l’un
des objectifs poursuivis par la SBMN – qui compte aujourd’hui
une septantaine de membres – depuis sa création en 2004.
Cela pourrait bientôt aboutir à l’ULg dans la cadre de travaux
menés dans ce sens avec le Pr Nicolas Paquot, titulaire de la
chaire de nutrition humaine à la faculté de Médecine.
L’un des autres piliers visés par Anne Boucquiau, qu’elle ex-
posa notamment au mois de septembre lors d’une conférence
à Liège à l’invitation de l’asbl “Au sein des femmes”, est le
rapport entre nutrition, hygiène de vie et cancer. Les recom-
mandations du Fonds mondial de recherche contre le cancer
soulignent trois axes dans la prévention de cette maladie : le
poids corporel, l’activité physique et l’alimentation. « Mais il ne
faut pas se tromper d’ennemi. Le lien entre les polluants, qui
représentent 0,6% des cause de mortalité, est trop complexe
et il faut, à ce jour, conserver une grande prudence. Ils existent,
mais il s’agit l’analyser l’impact à l’échelle d’une population.
L’obésité, elle, se situe à 2% ». Les chiffres datent de 2000,
mais sont toujours évidents.
Le thème du nutrition day, cette année, était la dénutrition.
Un problème que l’on observe davantage chez les personnes
âgées ou en situation de solitude, mais également chez les
personnes atteintes d’un cancer ou d’autres pathologies. Cet
aspect, et sa prévalence, n’est pas toujours suffsamment pris
en compte. « C’est assez criant dans les hôpitaux, où l’on n’ose
même pas le murmurer. Ce n’est généralement ni bon ni équi-
libré… et ça ne donne pas envie de manger à des patients qui
ont déjà peu d’appétit. » Un nouveau cheval de bataille.
Fabrice Terlonge
On est ce que l’on mange
M
aintes fois rabâchée, il est une expression populaire
qui perd son opacité une fois que l’on a poussé la
porte du cabinet d’Anne Boucquiau à Marche-en-Fa-
menne : “On est ce que l’on mange”. Hasard du calendrier,
c’est le jour du nutrition day que nous rencontrons ce médecin
nutritionniste, femme accomplie très en accord avec ses idées,
a 60 km de l’Université où elle a décroché son diplôme de doc-
teur en médecine en 1986. Une maison où semblent régner
tranquillité et qualité de vie, à quelques jardins de l’église de
Waha où l’artiste Jean-Michel Folon signa six vitraux de toute
beauté. Une œuvre personnelle conçue, de toute évidence,
pour le bonheur de la collectivité.
Ses compétences, le docteur Boucquiau les investit dans une
mission qui vise à contribuer à préserver ou à améliorer le
“capital santé” de la population et à parfaire notre système
de soins de santé. C’est même son postulat. Il n’était dès lors
pas surprenant de retrouver celle qui est actuellement prési-
dente de la Société belge des médecins nutritionnistes (SBMM)
comme responsable “santé” au sein du cabinet de la ministre
de la Santé en Communauté française, de 2005 à 2009. Ou
impliquée dans sa commune, notamment comme présidente
de l’asbl Nutrition.
Il aura fallu une rencontre avec le pédiatre Jacques Senterre,
responsable du service de néonatalogie, lorsqu’elle était en
quatrième année de doctorat, pour qu’elle aborde le domaine
et prenne conscience de l’importante de la nutrition chez les
nouveau-nés, et plus précisément quant à la survie des bébés
prématurés. Dans les années 1980, la mortalité infantile était
encore importante. Et la nutrition n’était pas enseignée à l’ULg.
Séance tenante, elle prend la direction de l’université de Nancy
pour un DIU en nutrition humaine alors qu’elle exerce, dans
le même temps, en tant que médecin généraliste. « Comme
la médecine nutritionnelle n’existait pas encore en Belgique,
j’ai été confrontée à une certaine réticence émanant de mes
confrères. Il a donc fallu que j’installe un climat de confance.
Côté patients, Marche-en-Famenne est une région agricole où
les gens étaient naturellement convaincus qu’ils mangeaient
bien. Il a fallu en persuader certains du contraire. »
C’est donc en 1988 qu’elle s’installe comme nutritionniste.
Au menu de ses consultations : les problèmes du surpoids
et de ses conséquences métaboliques (diabète de type 2,
hypercholestérolémie, hypertension), conseils à destination
des femmes enceintes, sportifs, arrêts tabagiques et patho-
logies strictement liées à l’alimentation (pathologies rénales,
allergies alimentaires). « Le médecin dispose d’une palette de
traitements plus large que celle d’un diététicien. Et l’approche
est plus globale. Je me suis également spécialisée en thérapie
cognitivo-comportementale ou entretiens motivationnels, là où
le patient s’appuie sur ses propres motivations pour atteindre
ses objectifs. »