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Hiver 2011 - 2012
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LIÈGE
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Ernest de Bavière
Une exposition sur la fn de la Renaissance à Liège
Si Ernest cumule les bénéfces et n’a pas peur de s’écarter
de la règle du célibat des prêtres, il reste pourtant activement
soutenu par un Saint-Siège persuadé de son rôle-clé dans
le renouveau catholique aux frontières allemandes. Dès son
élection, il renforce à Liège la législation antiprotestante.
Ami de Galilée et de Kepler, Ernest de Bavière s’intéresse à
l’astronomie et fait fabriquer des astrolabes à Liège, grâce à
la technique du laiton bien maîtrisée dans la Principauté. En-
touré d’humanistes tels que Juste Lipse, il nourrit aussi une
passion pour Paracelse et l’alchimie, discipline très en vogue
à l’époque de la Renaissance. Si l’un des buts de l’alchimie
est la transmutation des métaux en or, l’autre objectif est la
prolongation de la vie. La médecine est donc au cœur de
l’œuvre de Paracelse et particulièrement favorisée par Ernest
de Bavière. « Dans le domaine médical et de la bienfaisance,
l’institution emblématique de son règne est certainement
l’hôpital établi dans un de ses palais, la “Maison Porquin”,
située sur l’actuelle place de l’Yser en Outremeuse », détaille
Geneviève Xhayet. C’est l’origine de l’hôpital de Bavière qui
a gardé son nom.
Capitaine d’industrie avant l’heure, le prince-évêque parie
sur l’importance des mines et des hauts-fourneaux ; il s’in-
vestit dans la création de sociétés par actions ; il lance un
prix pour les inventeurs. C’est aussi l’époque des nouvelles
armes et de la poudre à canon qui feront la fortune de Jean
De Corte, dit Curtius.
Patricia Janssens
* Ernest de Bavière (1554-1612) et son temps. L’automne fam-
boyant de la Renaissance entre Meuse et Rhin, études réunies par
Geneviève Xhayet et Robert Halleux, Brepols, Turnhout, 2011.
M
oins connu que Notger, Erard de la Marck ou Velbrück,
Ernest de Bavière, prince-évêque de Liège de 1581 à
1612, est pourtant le premier prince Wittelsbach des
Temps modernes dans notre Principauté. Homme politique
très infuent, défenseur de la catholicité en un temps marqué
par les guerres de religion, c’est un évêque peu orthodoxe :
il s’affche ici et là avec des maîtresses et il légitime ses en-
fants. Controversé hier, il l’est encore aujourd’hui. Et pourtant
son “règne” marque une étape importante pour la Principau-
té de Liège qui entre avec lui dans l’époque moderne.
Si plusieurs grandes expositions à Liège ont retracé l’histoire
de la Principauté, aucune n’avait encore évoqué la fn de la
Renaissance. Le 400
e
anniversaire de la mort d’Ernest de
Bavière vient à point nommé pour mettre un terme à cette
injustice : l’exposition “Ernest de Bavière, 1581-1612. Un
prince-évêque liégeois dans l’Europe moderne” est ouverte
au musée Curtius jusqu’au 20 mai 2012.
A l’initiative du projet, le Centre d’histoire des sciences et des
techniques de l’ULg (sis en Outremeuse), dirigé par Robert
Halleux et Genevière Xhayet. A la réalisation, l’échevinat de
la Culture de la ville de Liège et le musée Curtius avec le
conservateur Jean-Marc Gay comme scénographe. « Le
choix du contenu de l’exposition et celui des pièces exposées
relèvent du Centre », précise Robert Halleux. Le catalogue
est également conçu et mis en page place Delcourt, avec
le concours d’auteurs “maison” : outre Geneviève Xhayet et
Robert Halleux, le Pr Jean-Patrick Duchesne, Annick Delfosse
et Emilie de Corswarem ont participé à la rédaction du livre
qui sera abondamment illustré*.
« Fils du duc de Bavière Albert V, Ernest de Bavière est d’abord
un prince, un homme politique avant d’être un évêque,
affrme Annick Delfosse, chargée de cours au département
des sciences historiques. Véritable pion placé par son père
pour empêcher la propagation du protestantisme, il fut non
seulement prince-évêque de Liège, mais encore archevêque-
électeur de Cologne, prince-abbé de Stavelot, évêque de
Freising, Hildesheim et Munster, etc. »
Défenseur du Concile de Trente, celui qui dirigea la Principau-
té pendant 30 ans ressemble assez peu cependant au nou-
veau modèle de l’évêque prescrit à Rome. « Contrairement
au Concile qui impose en effet au prélat de résider dans son
évêché, Ernest de Bavière s’absente la plupart du temps de
ses diocèses qu’il confe à des évêques suffrageants ou à des
vicaires généraux, reprend la chercheuse, spécialiste de l’his-
toire moderne. A Liège, c’est à l’humaniste et poète Laevinus
Torrentius qu’il délègue ses responsabilités épiscopales, puis
à Thierry de Lynden et Jean Chapeaville. Tous lui reprochent
d’être un prince-évêque trop lointain : le sage Torrentius, en
particulier, lui adressera plusieurs remontrances indignées. »